Papy fait de la résistance des planches au grand écran

Papy fait de la résistance : des planches au cinéma

Sorti le 26 octobre 1983, Papy fait de la résistance de Jean-Marie Poiré s’est avéré être, contre toute attente, l’un des plus gros succès de l’année : 4.103.933 entrées, à quelques milliers de spectateurs seulement des Compères avec Pierre Richard et Gérard Depardieu, ainsi que du Marginal avec Jean-Paul Belmondo, distribué le même jour.

Papy fait de la résistance au théâtreÀ l’origine de ce film, une pièce de 1981, peu connue car jamais captée. Généralement rattachée aux Bronzés (ex- Amour, coquillages et crustacés) et autre Père Noël est une ordure, Papy fait de la résistance n’est pourtant pas une « Splendid » entreprise. À l’aube des années 1980, la bande des débuts n’existe plus : Michel Blanc est devenu la muse du réalisateur Patrice Leconte (Viens chez moi, j’habite chez une copine, Ma femme s’appelle reviens, Circulez y a rien à voir), Gérard Jugnot multiplie les expériences cinématographiques en tout genre, de Charles Nemès (Les héros n’ont pas froid aux oreilles) à Gérard Oury (Le Coup du parapluie) en passant par Jean-Pierre Desagnat (Les Charlots contre Dracula). Thierry Lhermitte peine à décoller et s’égare (Légitime violence, Un homme à ma taille, L’indic), tandis que Josiane Balasko poursuit son petit bonhomme de chemin créatif (Bunny’s Bar, Nuit d’ivresse), à son rythme, et en comité réduit.

Il faut préciser ensuite que leurs récentes collaborations ont plutôt été source de douleurs et de conflits : la rédaction des Bronzés font du ski s’est terminée à six mains, celles de Jugnot, Clavier et Lhermitte, leurs confrères prêchant prioritairement pour leur paroisse respective, et Le Père Noël est une ordure ne fut pas du goût de tous, particulièrement celui de Michel Blanc (rappelons cependant qu’il interpréta le rôle-titre, sur scène, lorsque Jugnot s’absentait en raison d’un tournage).

Le texte de Papy fait de la résistance a donc été conçu par Christian Clavier et Martin Lamotte seuls. Tous deux ont fait leurs armes au café-théâtre, en voisin, ce qui fut le point de départ d’un coup de foudre artistique réciproque. Clavier se remémore : « Quand j’ai rencontré Martin chez ses parents, rue Duret, et chez Balachova, je l’ai trouvé de suite très irresponsable, mais doté d’un fabuleux talent de parodiste et excellent acteur. Puis, il avait écrit des choses vraiment intéressantes, comme sa Revanche de Louis XI que je trouve brillante au niveau des dialogues. C’est là que je me suis dit que je pourrais écrire avec lui. »

Papy fait de la résistance au théâtre

Après avoir figuré au sein des Bronzés puis du Père Noël est une ordure, Martin Lamotte esquisse, avec la complicité de Philippe Bruneau, le script et les dialogues de Quand tu seras débloqué… fais-moi signe ! retitré Les Babas-Cool, et dont Christian Clavier est le héros, sous la direction de François Leterrier. Un succès modeste en 1981, culte dorénavant. Dès lors, les liens d’amitié qui unissent Lamotte et Clavier se resserrent, et ce d’autant plus qu’ils habitent à cette époque dans le même immeuble à un étage d’intervalle. Pratique lorsqu’il s’agit d’organiser des réunions de travail. Là, en quête de perspectives, ils s’appuient sur des références communes où se côtoient Blake Edwards et les Marx Brothers.

Papy fait de la résistance au théâtre
Papy fait de la résistance au théâtre

En résultent diverses ébauches, telles que Aventures en Inde, parodie théâtrale de vieux films de série B, ou encore une vague intrigue mettant en scène le poète et écrivain Nicolas Boileau. Aucune n’est montée. Ils croient davantage en un sujet tout aussi foisonnant, celui de la Résistance française face à l’Occupation allemande dans les années 1940. Christian Clavier précise : « Martin et moi, on voulait faire une pièce en incluant du spectaculaire dans la mise en scène, des lumières chiadées, une vraie bande-son. » Ils s’inspirent en surface du Silence de la mer de Vercors et narrent, en définitive, les tribulations d’une famille recluse dans les sous-sols de sa propre maison, un général allemand ayant réquisitionné l’essentiel de l’habitat avec son régiment. Christian et Martin se réservent deux des rôles dominants. À l’un, Michel Taupin, un doux naïf rêvant secrètement d’héroïsme. Au second, Guy-Hubert, coiffeur efféminé le jour, Super-Résistant la nuit.

G. Jugnot, C. Clavier, M-A. Chazel, R. Giraud, C. Jacquinot, M. Lamotte dans la pièce Papy fait de la résistance

D’une cave humide et sinistre, on aboutit soudainement à un carnaval ébouriffant, entre humour noir et décalage permanent. Marie-Anne Chazel, Gérard Jugnot, Roland Giraud, Carole Jacquinot, Bruno Moynot complètent l’affiche de cet atypique Papy fait de la résistance. La Première a lieu le 6 novembre 1981 au Splendid Saint-Martin. La pièce se joue jusqu’au 29 mai de l’année suivante, et se voit prolongée du 7 août au 1er janvier 1983. Un carton rapportant près d’un demi-milliard de recette ! Chaque soir, la foule est sous le charme. Christian et Marie-Anne sont d’ailleurs baptisés les « Renaud-Barrault du café-théâtre. » Bref, la consécration est totale.

Christian Clavier dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Jean-Paul Muel dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Dominique Lavanant dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

De fait, l’idée d’une adaptation cinématographique ne tarde pas à émerger. Sitôt celle du Père Noël est une ordure bouclée, Clavier sollicite à nouveau Poiré : « Avec Jean-Marie, c’est fabuleux ! Il n’y a pas de compromis ou d’abandon entre nous. On se suscite l’un l’autre. Notre travail ensemble est meilleur que s’il s’effectuait seul. » Mais cela ne se fait pas sans mal. D’abord, le réalisateur tergiverse : « J’aimais beaucoup la pièce de Lamotte et Clavier, mais le premier scénario qu’ils m’ont proposé était très mauvais, même si j’adorais la scène des gros œufs à la coque, qui est une idée de cinglé de Martin Lamotte. »

Six mois de réécriture sont nécessaires, et pas moins de cinq versions se succèdent ! Afin d’enrichir au mieux leur script, les trois compères se procurent moult documents, livres ou revues, sur la Guerre, l’Occupation, et s’enferment des journées entières à la Cinémathèque de Bois d’Arcy, où ils visionnent une multitude de films français tournés entre 1946 et 1950. En conséquence, ils s’éloignent progressivement de la pièce, tant dans l’intrigue et son traitement – les scènes à la cave ne représentent plus qu’un très faible pourcentage – que dans le ton – l’esprit café-théâtre n’est plus qu’un lointain souvenir.

Jacques Villeret dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Michel Galabru dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Jean Yanne dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

Reste à dénicher un financier à la hauteur pour emballer l’affaire. Christian Clavier boycotte d’office son oncle, Yves Rousset-Rouard, producteur des Bronzés et des Bronzés font du ski, ainsi que du Le Père Noël est une ordure ! Il faut dire que l’entente n’a jamais été au rendez-vous. L’équipe du Splendid a souvent dû se battre pour défendre ses aspirations. Par exemple, pour Le Père Noël est une ordure, Rousset-Rouard était prêt à tourner directement dans les décors de la pièce. Gain de temps, et d’argent. Fort heureusement, devant l’insistance de la troupe et celle du réalisateur, il s’est résolu à accepter la construction d’un cadre nettement plus élaboré. Même type de débat concernant la durée globale du temps de tournage ou le nombre de prises par plan. Épuisant.

Michel Blanc dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Bernard Giraudeau dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Roger Carel dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

Rousset-Rouard éliminé, c’est alors que Christian Fechner, au palmarès déjà impressionnant (Les Fous du stade, La Moutarde me monte au nez, L’Aile ou la cuisse, La Zizanie, L’Animal, La Soupe aux choux, L’Avare…), entre dans la course. Il apprécie la pièce, et la possibilité d’une transposition sur grand écran l’intéresse vivement. Clavier n’y va pas par quatre chemins. Il n’a rien à perdre, et peut-être tout à gagner. Face à Fechner, il déballe : « Je sais que je ne vaux pas le haut de l’affiche d’un film à grand spectacle, mais comme je pense que vous avez envie d’acheter notre pièce, moi je ne veux pas la vendre pour en faire un petit film. Ou ça vous intéresse dans ces conditions, et on fait affaire, ou vous me dites “non”, on garde notre pièce et on vous écrit autre chose. »

Josiane Balasko dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Jacques François dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Gérard Jugnot dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

De son côté, Fechner s’engage à y mettre le prix, à condition d’avoir une immense star au casting. Le nom de Louis de Funès, dont Fechner a produit les quatre derniers films, fait l’unanimité. L’acteur, qui porte un regard bienveillant sur le travail de cette jeune génération, donne rapidement son accord, à condition d’avoir un rôle réduit pour ne pas fatiguer son cœur. À l’arrivée, le budget est estimé à trente millions de francs ! Avec Christian Fechner, on ne mégote pas. Hélas, Louis de Funès décède brutalement le 27 janvier 1983 d’une crise cardiaque, et le projet est tragiquement remis en question.

Pauline Lafont dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Alain Jérôme dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Jean-Claude Brialy dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

Maintes rumeurs ont circulé sur le rôle qu’il devait tenir au sein de Papy fait de la résistance. Jean-Marie Poiré explique : « On parlait sans arrêt de de ce qu’on allait faire pour Louis, et on évoquait des idées. » Possibilité numéro une, le personnage de Papy. Pourquoi pas ? On l’imagine aussi dans la peau du maréchal Ludwig von Apfelstrudel, le demi-frère fictif d’Adolf Hitler, interprété par Jacques Villeret. Ce n’est pas tout. Martin Lamotte assure pour sa part que de Funès avait accepté l’emploi d’un vieux « poilu » ayant survécu à la Première Guerre Mondiale, et cohabitant depuis avec la famille Bourdelle sur leur propriété, dans une cabane, au fond du jardin. Quoi qu’il en soit, « Le film lui est dédié, car s’il n’avait pas accepté de le faire, on n’aurait pas commencé à l’écrire » précise encore Poiré.

Martin Lamotte dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Jacqueline Maillan dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Carole Jacquinot dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

Malgré cette douloureuse disparition, Fechner ne se laisse pas abattre et convainc l’assemblée d’un casting all-stars, à tous les plans, dans la lignée du Jour le plus long ou de Paris brûle-t-il ? De quoi justifier son budget pharaonique ! Une riche idée à laquelle Christian Clavier rend hommage : « Grâce à lui, Papy… est devenu un film encore plus ambitieux que ce qu’on avait imaginé au départ. » Mais plus facile à dire qu’à concrétiser. Jean-Marie détaille : « Tous les acteurs ont dit non. Le Splendid n’était pas assez chic. Un film choral pose des problèmes d’ego. Si on a Meryl Streep qui accepte un petit rôle, vous allez avoir tout le monde. Mais si vous commencez par les petits rôles, vous n’aurez personne. » Michel Serrault refuse notamment d’incarner le Général Spontz, et Bernard Blier ne se voit pas en Papy. De la même façon, le scénario n’amuse nullement Robert Hirsch, et sa réponse se révèle tout aussi négative. La production est également victime d’une cabale, plusieurs comédiens se passant le mot afin qu’aucun ne participe au film, qu’ils jugent accablant.

Jean Carmet dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Thierry Lhermitte dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)
Julien Guiomar dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

En outre, Jean-Marie Poiré et Christian Fechner ne s’entendent pas sur le personnage d’Héléna Bourdelle, dite Mamina. Le premier souhaite Delphine Seyrig, le second Annie Girardot. Ce ne sera ni l’une ni l’autre, et après avoir envisagé un temps Jerry Lewis (!), les deux hommes tranchent finalement en faveur de Jacqueline Maillan, bien qu’elle exige un cachet digne d’une star hollywoodienne, ce à quoi Fechner s’oppose. Ce dernier hésite enfin à confier le rôle-titre à Michel Galabru, mais la présence en complément de Jacques Villeret, Pauline Lafont, Julien Guiomar, Jacques François, Jean Carmet, Jean Yanne, Roger Carel, Jean-Claude Brialy et de Bernard Giraudeau (dans le rôle le plus court du film) finit par le convaincre. On avait encore rarement vu une distribution à ce point prestigieuse. L’affiche ne s’en cache pas : « Le film qui a coûté plus cher que le Débarquement ! » Ce qui amène un journaliste à s’interroger : « Mais comment ont-ils fait pour chiffrer le coût du Débarquement ? ».

Roland Giraud dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

Parallèlement, Le Splendid et ses amis obtiennent en juste récompense une jolie part du gâteau, Christian Clavier et Martin Lamotte en tête. Gérard Jugnot persévère avec les cris stridents d’Adolfo Ramirez de la Gestapo ; Roland Giraud conte toujours fleurette derrière l’uniforme de Spontz, grâce à Clavier qui l’impose contre l’avis de Fechner ; Dominique Lavanant endosse quant à elle l’identité de Bernadette Bourdelle, fiancée à Michel Taupin ; Josiane Balasko devient pharmacienne, Thierry Lhermitte est un colonel SS et Michel Blanc un curé, sans oublier Bruno Moynot, héritant du modeste Flandu. Ne manque que Marie-Anne Chazel, retenue pour un rôle plus important, celui de jeune maman. Elle accouche effectivement en cette année 1983 d’une petite fille prénommée Margot.

Papy fait de la résistance - photo d'équipe

Sur le plateau, c’est du sérieux. On est aux antipodes du « film de potes » façon Bronzés. Ici, la machinerie en impose : courses-poursuites, fusillades, combats à l’épée ou à coup de fer à repasser, etc. Néanmoins, le plaisir demeure. Martin Lamotte rapporte : « C’est un peu la grande famille des comiques. Maillan et Galabru nous ont dit : « Depuis des années on fait du comique, et depuis des années on nous traîne dans la boue. Mais on existe toujours, on est même en pleine forme ! Alors n’hésitez pas, allez-y à fond ! » Il est vrai que certains auraient aimé un peu plus d’embellissement, voire de libertés à propos de leur personnage. Un jour, Maillan imagine la réplique « Quand Mamina va, tout va ! » et propose de la répéter tout au long du film, à sa sauce. Poiré décline. Papy fait de la résistance, ce n’est pas Au théâtre ce soir ! Il ne lui permet pas non plus de chanter lorsque le scénario l’indique – lui préférant la voix d’une professionnelle – et la colère de l’actrice, piquée d’une évidente jalousie, monte d’un cran face à Villeret entonnant « Je n’ai pas changé », avec l’accent allemand, sans doublure. Il y a des regards qui ne trompent pas, et celui de Maillan, au cœur de cette séquence, en dit long sur ses pensées.

le chat Romulus dans Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)

À l’identique, Michel Galabru ne se sent pas toujours suffisamment respecté. Il raconte : « Jugnot, Clavier, Lamotte… Tous ces jeunes acteurs devenaient des vraies vedettes de cinéma, au point qu’une certaine concurrence est née entre nous sur le tournage. Une anecdote fâcheuse illustre cette rivalité non avouée entre le camp des vieux et celui des jeunes. À la cantine, Jugnot a fait une allusion à ma tenue vestimentaire : « Pourquoi tu mets des jeans ? Ça fait plus jeune, Michel ? » s’est-il moqué. »

Gérard Jugnot et Jean-Marie Poiré sur le tournage de Papy fait de la résistance

Il n’empêche, ces petites tensions n’altèrent en rien le bon aboutissement de cette réalisation tournée sous le signe d’une humeur majoritairement joyeuse. Lavanant et Maillan partagent d’innombrables fous rire. L’un d’eux les contraint même à poursuivre séparément l’enregistrement d’une séquence, laquelle s’étale sur deux jours. Roger Carel rend compte d’une ambiance allègre : « Le mot JOUER à ce moment-là est vraiment à prendre dans l’acception du terme, parce qu’on vient JOUER, on vient S’AMUSER. » Roland Giraud se réjouit de clamer le plus sérieusement du monde des insanités en langue germanique, et Martin Lamotte se rappelle de longs déjeuners, où tous les acteurs se retrouvaient avec un plaisir tel, qu’ils avaient parfois du mal à sortir de table sans l’intervention d’un assistant.

Jean-Marie Poiré sur le tournage de Papy fait de la résistance

In fine, Papy fait de la résistance revêt la parure d’une admirable épopée historique, la déconne en supplément. À la mise en scène, Poiré s’investit largement, soutenu par la photographie impeccable de Robert Alazraki, les décors de Willy Holt, et une bande originale signée Jean Musy : « Une de mes références était L’Armée des ombres de Jean-Pierre Melville, en 1969. J’ai demandé qu’on fasse le même type de lumière, on a fait faire des costumes dans des couleurs passées et ternes, tout cela avec beaucoup de soin, et les moyens que cela nécessitait. Réussir une parodie implique pour moi la même exigence que celle de l’original qu’on tourne en dérision. »

L’œuvre achevée, les critiques tirent à bout portant. C’est un massacre. Pour Éric Léguebe, du journal Le Parisien libéré, en date du 29 octobre 1983, « On reste coi face à tant de vulgarité et d’indigence. Pas un soupçon d’invention. » Gilles le Morvan, dans L’Humanité, surcharge : « Le fruit de la raillerie la plus désolante et de la plus vulgaire provocation. Le rire sent un peu la naphtaline. Une telle prestation relève probablement de l’irresponsabilité. » Conjointement, Louis Skorecki de Libération s’emporte, et titre cruellement : « Papy fait de l’asthme » avant d’enchaîner : « Papy fait de la résistance se traîne et les acteurs s’essoufflent ! Un film comique ? Le pire, c’est l’absence de rythme, de tempo. Même pas un mauvais montage : un découpage cotonneux, inexistant, plat comme une plaine. Un peu de finesse et de légèreté c’est justement ce qu’on ne trouve jamais dans Papy. » Sur cette lancée, Le Figaro, en la personne de Claude Baignières, estime que « L’anecdote étouffe sous le spectacle, et le budget qu’il suppose est tout aussi pesant sans doute que le scénario. » Bouquet final avec le futur cinéaste Nicolas Boukrief qui, dans Starfix, résume : « Le film n’est pas drôle. Voilà. On s’y ennuie car aucune cible n’est vraiment définie, aucune vanne ne fait mouche. » [voir d’autres critiques sur le film].

Papy fait de la résistance (Jean-Marie Poiré, 1983)D’anciens Résistants y ajoutent leur grain de sel, choqués qu’on puisse se moquer d’eux ouvertement. À cela, Jean-Marie Poiré répond, et conclut : « Papy… est beaucoup plus un film sur la vision qu’on a de la Résistance aujourd’hui qu’un film sur la Résistance. Nous sommes d’une génération qui ne connaît la Guerre de 1940 qu’à travers une flopée de mauvais films qui, tous, n’étaient que des imitations des deux ou trois chefs-d’œuvre du genre. Nous, on a préféré faire un chef-d’œuvre en imitant ces mauvais films ! C’est important de voir la vie avec humour. C’est Raymond Devos qui a dit : « Quand ce n’est pas drôle, ce n’est pas intelligent. » Nous n’avons pas fait un film comique pour faire un film comique de plus, mais parce que nous trouvons que les films comiques et les comédies sont plus intelligents que les drames. »

Pour preuve, le public a su donner à Papy fait de la résistance la place qu’il mérite dans l’Histoire. D’un succès, il en a fait un classique immuable. Appelez-le Super, pas de chichi !

carte d'identité de Michel Taupin dans Papy fait de la résistancepar Gilles Botineau

Pour en savoir plus :
Gilles Botineau, Christian Clavier, Splendid carrière ! (C. Navarro éditions)
Christophe Geudin & Jérémie Imbert, Les Comédies à la française (Fetjaine)
Michel Galabru, Les Rôles de ma vie (Hors collection)
Alexandre Grenier, Génération Père Noël (Belfond)
Première n°79, octobre 1983 (Société d’édition de Première)
Les cahiers du cinéma n°465, mars 1993 (Les éditions de l’étoile)

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