Sortie en DVD et Blu-ray chez ESC de Crazy Day, la première comédie de Robert Zemeckis produite en 1978 par Steven Spielberg.
Le soir du 9 février 1964, Robert Zemeckis, onze ans, et 73 millions de téléspectateurs américains assistent à la diffusion hebdomadaire du Ed Sullivan Show. Entre deux numéros d’acrobates et d’interminables interludes comiques, l’animateur le plus raide de l’histoire de la télévision accueille pour la première fois un pop group tout droit venu de Liverpool : les Beatles. Quatorze ans plus tard, le futur réalisateur de À la poursuite du diamant vert, Forrest Gump et des aventures spatio-temporelles de Marty McFly fera de ce moment-clé de la pop culture le sujet de son premier long-métrage, I Wanna Hold Your Hand. Rebaptisée Crazy Day par les distributeurs hexagonaux, la comédie alerte de Zemeckis filtre les premiers feux de la Beatlemania américaine au travers du regard d’une bande d’adolescents interprétés par Nancy Allen, l’égérie de Brian de Palma, Marc McLure (vu la même année en Jimmy Olsen dans le Superman de Richard Donner), Theresa Saldana, Wendie Jo Serber, Bobby Di Cicco et Susan Kendall Newman, fille de Paul. Le temps d’une journée, Crazy Day retrace leur périple initiatique, de la grise banlieue de Maplewood, dans le New Jersey, jusqu’au plateau quasi-mythique d’Ed Sullivan.
Rythmée par une bande-son 100% Fab Four -17 titres période 1962-1964, un rêve de musical supervisor -, Crazy Day signale également le tout premier crédit de Steven Spielberg en tant que producteur. Au mitan des années 1970, Robert Zemeckis et son acolyte, le scénariste Bob Gale, avaient présenté au réalisateur ultra-bancable des Dents de la mer le pitch insensé de 1941. La pièce montée guerrière du trio verra finalement le jour en 1979, mais dans l’intervalle, le Mogul deviendra le parrain bienveillant d’un Zemeckis n’ayant alors qu’à son actif une paire de courts-métrages. Traversée d’irrésistibles personnages secondaires, dont l’hyper-geek Richard « Ringo » Klaus interprété par Eddie Deezen, son attachante comédie burlesque aligne d’astucieux clins d’œil à la mythologie Beatles (rendez-vous à la chambre 909 !) et ose un cinglant sous-texte érotique lorsque Nancy Allen caresse de très près la mythique basse Hofhner de Paul McCartney.
Crazy Day, sans doute victime de son anachronisme culturel en pleine ère disco/post-punk, passe inaperçu lors de sa sortie américaine. Discrètement distribué en salles dans nos contrées au lendemain du succès de Retour vers le futur, ce méconnu premier essai aux tonalités slapstick est à nouveau disponible dans une édition DVD /Blu-ray enrichie de bonus érudits commentés par Rafik Djoumi et Rémi Grelow, spécialiste de l’œuvre de Robert Zemeckis. Prêts pour une délirante hard day’s night ?
par Christophe Geudin