Hommage à Danièle Delorme

Comédienne et productrice de grand talent, Danièle Delorme vient de nous quitter le 17 octobre 2015 à l’âge de 89 ans.

Elle était Marthe Dorsay dans Un éléphant ça trompe énormément et Nous irons tous au paradis. Transi d’amour, Lucien (Christophe Bourseiller), un étudiant de 17 ans, lui déclarait sa flamme, servi par les jolis mots de Jean-Loup Dabadie : « J’aime vos seins, enfin euh… surtout le gauche ! »

Danièle Delorme et Christophe Bourseiller dans Un éléphant ça trompe énormément (Yves Robert, 1976) - © Gaumont

Mais Danièle Delorme était beaucoup plus que cela. Jonglant à partir de 1942 entre une carrière au théâtre (dans des pièces de Jean Anouilh, Henrik Ibsen, Marcel Achard, Luigi Pirandello, Paul Claudel, Paul Valéry, Albert Camus, Eugène Ionesco, etc.), et une au cinéma (dans des films de Marc Allégret, Roger Richebé, Jean Delannoy, Maurice Tourneur, Henri-Georges Clouzot, Jacqueline Audry, Christian-Jaque, Sacha Guitry, André Cayatte, Julien Duvivier, Jean-Paul Le Chanois, Georges Lautner, Agnès Varda, etc.) elle se tourne vers la production et fonde avec le cinéaste Yves Robert, son second époux, La Guéville. Auparavant, elle a été mariée de 1945 à 1955 avec Daniel Gélin avec qui elle a eu deux enfants, dont le comédien Xavier Gélin.

Franck Villard et Danièle Delorme dans Gigi (Jacqueline Audry, 1949)
Danièle Delorme et Bourvil dans Miquette et sa mère (Henri-Georges Clouzot, 1950)

Baptisée La Guéville du nom d’une petite rivière prenant sa source dans le parc du château de Rambouillet, cette maison de production est créée afin de mettre sur pied l’adaptation cinématographique du célèbre roman de Louis Pergaud, La Guerre des boutons. Le couple réussit son pari en attirant plus de 10 millions de spectateurs dans les salles de l’hexagone, et en rendant célèbre la réplique de Petit Gibus : « Oh ben mon vieux, si j’aurais su, j’aurais pas venu ! »

La Guerre des boutons (Yves Robert, 1962)
Alexandre le bienheureux (Yves Robert, 1968)
Le Grand Blond avec une chaussure noire (Yves Robert, 1972)
Le Retour du Grand Blond (Yves Robert, 1974)
Un éléphant ça trompe énormément (Yves Robert, 1976)
Nous irons tous au paradis (Yves Robert, 1977)

C’est le début d’une vague de succès qui deviendront des classiques de la comédie à la française, notamment parmi les films réalisés par Yves Robert, souvent en co-production avec La Gaumont : Bébert et l’omnibus (1963), Les Copains (1965), Alexandre le bienheureux (1968), Le Grand Blond avec une chaussure noire (1972), Le Retour du Grand Blond (1974), Un éléphant ça trompe énormément (1976), Nous irons tous au paradis (1977), Courage fuyons (1979), Le Jumeau (1984).

Pierre Richard, Danièle Delorme et Yves Robert sur le tournage du Distrait (1970) - © Georges PierreDanièle Delorme et Yves Robert investissent très tôt sur un jeune comédien à qui le cinéaste a confié son premier rôle au cinéma dans Alexandre le bienheureux : Pierre Richard. Ils lui donnent ainsi sa chance en tant qu’auteur, réalisateur et acteur avec Le Distrait (1970) puis Les Malheurs d’Alfred (1971), avant de le faire exploser à un niveau international avec Le Grand Blond avec une chaussure noire.

Le couple magique de La Guéville permet également à des cinéastes en herbe de faire leurs premières armes – Jean-Paul Rappeneau et son délicieux La Vie de château (1965), Marco Pico et son caustique Un nuage entre les dents (1974),  Jean-Marie Poiré et son très sensible Les Petits câlins (1978) – tout en coproduisant des films de cinéastes confirmés – Alain Cavalier (Le Plein de super, Un étrange voyage), Jean-Luc Godard (La Chinoise), Bertrand Tavernier (Que la fête commence), etc.

C’est en parcourant les lignes de sa filmographie que l’on peut mesurer l’importance qu’a eue Danièle Delorme – indissociable d’Yves Robert – dans le cinéma français, et plus précisément dans un genre qu’elle et son second époux ont contribué à élever au rang d’art : la comédie.

Danièle Delorme © UPI/AFP

par Jérémie Imbert

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